L’Écorché est une image hybride qui propose une double lecture. Il y a d’une part une représentation classique de l’animal, suspendu à la manière de Jean Siméon Chardin ou de Jean-Baptiste Oudry, dans la tradition des natures mortes animalières, symbole de richesse et d’aisance sociale (depuis le Moyen Âge à nos jours). D’autre part un animal écorché inspiré des photographies d’abattoirs, devenu morceau de viande, vidé de son essence vitale et symbole de l’instrumentalisation du vivant. La relecture des peintres classiques met en abyme la violence des pratiques contemporaines d’abattages et questionne une forme « d’animalité inversée » où l’homme est un prédateur tout-puissant.
Fragments est une série de dessins qui emprunte ces titres au roman initiatique d’Hermann Hesse, Demian .
Dans ces dessins, ces Fragments, le temps semble suspendu dans une violence silencieuse. Les protagonistes oscillent dans une inquiétante étrangeté, où l’on ne sait pas si la figure humaine est témoin ou acteur, victime ou prédateur. La frontière entre bien et mal a disparu, l’innocence de l’enfance est brisée et se cristallise dans la représentation d’un instant. Tout est hésitant, il n’y a plus de certitudes, tout est devenu poreux, l’unité intérieure a disparu, un effondrement silencieux mais fondateur est survenu. Dès lors l’enfant devient multiple. La perte de l’innocence est la première déchirure, la découverte de la conscience et le lieu fondateur de l’individu.